par Marie-France de Meuron.
Nous connaissons évidemment les trois étapes de la croissance d’un être humain : l’enfance, l’adolescence et l’âge adulte. Dans la dimension psychique se manifestent la soumission, la révolte puis la créativité de l’adulte.
Chacune de ces étapes peut se révéler dans tout processus affectif, quel que soit l’âge et selon la dynamique intérieure.
La petite enfance nous montre le côté contemplatif d’un enfant : par exemple, quand il reçoit un objet, il est dans sa réceptivité. L’adulte bien soumis aux règles de la politesse lui enjoindra : « Dis merci » et le charme de l’instant est brisé s’il se soumet à l’injonction. Si l’adulte ressent le besoin de remercier, il peut le faire lui-même, ce qui sera un modèle pour l’enfant qui l’imitera dans un second temps, avec son propre élan.
À l’adolescence, la révolte est bien connue. Une force nouvelle surgit du fond de soi, animée entre autres par la force sexuelle qui donne l’énergie pour se dresser face à l’adversaire. Cette propension est canalisée par exemple dans les jeux sportifs. L’esprit de révolte se manifeste de plusieurs façons : vers l’extérieur, vers l’intérieur ou dans la retenue. Selon l’environnement et son tempérament, l’adolescent aura l’audace ou non de diriger sa révolte vers autrui ; sinon, il la ravalera ou alors se blessera. Je me souviens d’un adolescent – dont le père était très agressif – qui ne pouvait pas s’affirmer et qui soit fuguait, soit sombrait dans l’alcool, soit se brûlait avec une cigarette pour se prouver qu’il était fort.
L’âge adulte procure les forces pour assumer la création de son existence si l’individu peut en assumer sa dynamique. Au contraire, prenons l’exemple d’un fils qui obéit aux parents pour le choix d’une profession et qui ne pourra pas jouir de toutes ses forces intimes. On voit là qu’il peut alors se soumettre en faisant la formation imposée, se révolter en se faisant expulser de son école voire se faire congédier de son nouveau job ou alors franchement entreprendre ce qui lui tient à cœur.
Ces trois degrés se retrouvent dans toutes les situations de l’existence. Un grand principe était vécu par les anciens marins : « la nécessité est la mère de toutes les inventions ». Ainsi, lorsqu’ils étaient confrontés à un manque, donc soumis dans un premier temps, ils réagissaient avec vigueur puis parvenaient à créer de quoi améliorer leur condition.
Actuellement, les machines peuvent être très utiles mais en même temps notre dynamique de création est souvent brimée. Les riches sont en général moins créatifs que les pauvres qui doivent se creuser la tête et investir de leurs corps pour trouver des solutions ! On en vient même de nos jours à l’Intelligence Artificielle pour remplacer l’humain mais, de ce fait, le castrer en partie pour le moins de son intelligence créative adaptable à chaque instant, selon les intuitions du moment.
Dans les relations affectives, la soumission se perçoit quand on est sous le coup d’une nouvelle, puis on se révolte avec de l’émotion (= ex-motion, mouvement vers l’extérieur, ré-volte, retournement) comme la colère, la tristesse ou des gestes, puis si on fait recours à son potentiel adulte et créatif, on cherche une solution pour transmuter les forces en jeu et gérer de façon constructive la relation.
Cette graduation peut être illustrée aussi dans la dynamique homme-femme. Certaines civilisations ont imposé aux femmes d’être soumises, ce qui revient à dire qu’elles restent dans une certaine dynamique infantile. Dans l’absolu, cela n’est pas possible car elle est reine quand il s’agit de créer une progéniture et gérer le logis. Un tel système a créé une division en la femme, ce qui a, par la force de la nature, conduit à des révoltes qui ont pris différentes formes selon les périodes, les mœurs, le tempérament des femmes concernées et l’adaptabilité des messieurs !
Actuellement, on observe des mouvements féministes qui s’expriment différemment selon qu’ils sont dans une poussée de révolte ou de créativité. Un exemple patent en sont les Femen dont on parle nettement moins maintenant car leurs manifestations exhibitionnistes relevaient davantage de forces adolescentes de révolte, de plus de type yang. Ce qui est intéressant à signaler est que ce mouvement est d’origine ukrainienne, pays en révolution depuis des années !
Par ailleurs, il y a des femmes qui sont dans une dynamique créatrice en cherchant à exprimer les forces propres à l’être féminin. Annie Leclerc a exprimé dans son livre « paroles de femme » une affirmation très nouvelle pour l’époque qui troubla aussi bien les féministes que leurs adversaires.
Dans un courant actuel, Mariia Chaplia déclare : « La victoire du féminisme ne sera possible que lorsqu’il ne fera qu’un avec l’individualisme ». Autrement dit, c’est en vivant à partir de ses propres potentialités et capacités que la femme pourra être un être humain à part entière et non plus une entité qui imite l’homme et qui s’obstine à exiger une égalité plutôt qu’une équivalence. Au niveau pratique, « les femmes ont essayé de rivaliser avec les hommes avec les mêmes outils. Celles qui ont échoué sont généralement les plus bruyantes dans l’attente de privilèges ». Ce qui, en réalité, les conduit à retrouver un stade d’enfants soumis et dépendants comme « les entreprises non compétitives qui attendent des subventions ».
À chacun de prendre conscience à quel dynamisme il obéit afin de pouvoir choisir celui qu’il désire vraiment, non pas sous l’impulsion du libre-arbitre mais par l’aspiration à une réelle liberté.
source : http://mfmeuron.blog.tdg.ch/archive/2020/03/08/les-trois-etapes-de-croissance-304898.html#more
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