Dieu est-il grossophobe?

Dieu est-il grossophobe?

Dieu est-il grossophobe? Aime-t-il les gros? C’est ce que je me suis demandé en lisant le livre de Mickaël Bergeron, La vie en gros, Regards sur la société et le poids.

Définissons d’abord la grossophobie. Le terme calque des mots comme homophobie ou xénophobie et veut dénoncer une forme de discrimination, dans ce cas envers les gros.

Cette lutte contre la grossophobie s’inscrit dans un mouvement plus large, nommé Body positive. Ce mouvement réclame notamment plus de diversité corporelle dans les médias et dans la société en général. Il s’agit de s’opposer à la culture de la minceur et des diètes, et de l’uniformité que préconise indument la société. Le Body positive clame que toute personne possède le droit d’aimer son corps.

Jusque-là, je n’ai aucune objection. J’imagine très bien Dieu approuver la diversité corporelle. Il aime l’entièreté de sa création.

Quand défendre la diversité corporelle revient à normaliser l’obésité, voire la « célébrer » comme le veut Mickaël Bergeron, j’y vois cependant un problème et un refus de vérité.

La gourmandise et l’obésité

La gourmandise comme cause de l’obésité : c’est l’un des premiers sujets que Mickaël Bergeron aborde dans son livre. Selon lui, les gros subiraient injustement le préjugé qu’ils sont ainsi en raison d’un vice. Une telle vision ne tiendrait pas compte des différents métabolismes, du rôle de la société dans la vie des gens, des difficultés psychologiques, etc.

Évidemment, tous ne sont pas égaux quant à la prise de poids et, sans doute, la société dans laquelle on vit – qui favorise l’abondance et la sédentarité – accentue ce phénomène. Mais reconnaitre ces facteurs ne doit pas nier la part de liberté chez l’individu.

« Qui n’a jamais péché par gourmandise? », demande saint Augustin, reconnaissant par là combien il s’agit d’un vice commun et presque inévitable. La nourriture est non seulement bonne, mais nécessaire à l’homme, aussi est-il difficile de ne pas en abuser.

Malgré tout, Mickaël Bergeron soutient ne pas être gourmand : « C’est à force de côtoyer des ami.e.s gourmand.e.s que j’ai compris que je ne le suis pas. » Sa remarque étonne. Au plus fort de son poids, il pesait 484 livres. Il reconnait gérer difficilement son alimentation. Il le confesse notamment en révélant sa dépendance au Pepsi, avouant avoir déjà bu jusqu’à deux litres par jour.

C’est que la gourmandise consiste, selon lui, à aimer démesurément des mets sophistiqués et particuliers, nécessitant souvent une longue préparation. C’est ce que la société appelle parfois être gourmet.

Il n’a pas tort : être gourmet, c’est une forme de gourmandise. Mais manger en trop grande quantité, c’en est une aussi.

La gourmandise, pour le dire simplement, est un désir désordonné des plaisirs de la nourriture. Et ce désir se manifeste de diverses façons : manger à tout moment, avidement ou trop.

Ce vice peut également porter sur la qualité des aliments, quand on exige des mets exagérément couteux et rares, ou qui demandent une préparation sophistiquée.

Ces précisions montrent que la gourmandise ne concerne pas nécessairement le poids ou la santé. Quelqu’un en très bonne santé peut être gourmand. La gourmandise consiste fondamentalement à accorder une place disproportionnée à la nourriture dans sa vie. Ainsi, si tout gourmand n’est pas obèse, il n’en demeure pas moins que tout obèse a certainement déjà dû pécher par gourmandise.

Santé et obésité

Ne pas discriminer les gros, pour Mickaël Bergeron, c’est aussi refuser de dire que l’obésité nuit à la santé. Il écrit : « Tout le monde sait qu’être gros n’est pas bon pour la santé. Tout le monde le sait… mais ce n’est pas vrai. Comme le dirait un certain président : ‘‘FAKE NEWS!’’»

Mickaël multiplie les arguments pour le défendre : la minceur n’est pas gage de santé; du poids en trop ne cause pas nécessairement de problème; l’obésité n’empêche pas de vaquer à ses activités; l’augmentation du risque de problèmes de santé n’est que potentielle, etc. 

Je ne suis pas médecin et je ne répondrai pas à chacune de ses affirmations. Mais je connais suffisamment la logique pour savoir que « la minceur n’implique pas nécessairement la santé » ne fait pas conclure que « l’obésité n’implique pas nécessairement la maladie ».

L’obésité – surtout morbide –, quoi qu’en dise Mickaël Bergeron, est un problème de santé, une maladie.

Beauté et obésité

Encore plus que de dissocier l’obésité de la maladie, le mouvement Body positive veut l’en séparer de la laideur. Cette idéologie proclame que la beauté se trouve partout et que si les gros ne sont pas considérés comme beaux, c’est seulement à cause de la société qui encourage une grossophobie systémique. Avec une éducation appropriée et en présentant davantage de gros dans les médias, les gens reconnaitraient leur beauté.

Cet argumentaire m’apparait très problématique. C’est penser que la beauté dépend purement de la subjectivité et qu’elle ne se trouve aucunement dans la réalité. Mais c’est faux. La beauté est une propriété réelle des choses et ne se trouve pas premièrement, comme le veut un dicton trompeur, dans l’œil de celui qui regarde.

Dans les faits, la beauté est affaire de proportion. Le cas de la musique le montre avec évidence : qui qualifierait de beau un faux accord? Or, l’obésité, de même que la maigreur, empêche la proportion.

Et même si la beauté était subjective, comme le prétend Mickaël Bergeron, ce n’est pas par l’éducation qu’on se rendrait capable d’apprécier l’obésité. On ne s’éduque pas à ce qui est subjectif, comme il n’y a pas de vérité objective à apprendre, à connaitre. Au mieux, on se convainc d’une nouvelle idéologie, d’une nouvelle opinion, sans que celle-ci soit plus vraie qu’une autre. Quand tout est subjectif, personne n’a tort, personne n’a raison et il n’y a aucune éducation à chercher.

S’aimer quand on est gros?

Comme dans tout mouvement, le bon grain se mélange à l’ivraie. C’est le cas de l’idéologie Body positive. Évidemment, il faut s’opposer aux exigences de minceur de la société. Et certes, tout gros, toute personne, mérite accueil et bienveillance.

Mais cet accueil ne doit pas conduire au mensonge. Or, déclarer l’obésité bonne et belle et sans aucun lien avec la gourmandise, c’est mentir.

Mickaël Bergeron le remarque : difficile de perdre du poids quand on ne sent pas aimé. La consolation que procure la nourriture, quand on souffre d’un vide affectif, devient une véritable tentation. S’ensuit un cercle vicieux : on mange pour combler un vide, on grossit; on se sent plus vide, on mange, on grossit de nouveau, etc.

Il importe de trouver des solutions pour combler ce vide affectif. J’en propose trois : la confession, le mariage et la prière.

Confesser sa gourmandise permet de se montrer en vérité et de recevoir le pardon et l’amour de Dieu, ainsi que sa grâce pour lutter. 

L’institution du mariage constitue également une façon concrète de se sentir aimé au quotidien, nonobstant les changements corporels divers que vit une personne au cours de sa vie.  Mickaël Bergeron s’offusque dans son livre d’avoir été qualifié d’« homme à marier ». Il préfèrerait susciter les fantasmes. Comment combattre la culture superficielle dans laquelle on vit en encourageant les fantasmes d’un soir plutôt que la fidélité dans les épreuves? Même si l’on n’est pas marié, cette institution sert toute personne, car sa valorisation fournit, dans l’imaginaire collectif, une direction à l’amour, direction permettant de contrer la culture des relations « jetables » dans laquelle on vit et dans laquelle, donc, la beauté physique reçoit une attention démesurée. 

Enfin, prier donne l’occasion de crier vers Dieu, de lui exposer nos faiblesses, et même nos complexes. Qui crie vers lui trouvera, c’est mon expérience, consolation. 

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