Le charme discret de l’inversion

Le charme discret de l’inversion

Le charme discret de l’inversion

11 novembre 2021 – Dans le texte d’hier des ‘Carnets de Dimitri Orlov’, le titre original (« The Reverse Green Energy Cargo Cult »), justement traduit originellement « Le culte du cargo de l’énergie verte inversé », a été modifié sur ma douce insistance en : « L’UE et son culte “inverti” du cargo ». Je tenais beaucoup, ayant sans doute cette page du ‘Journal’ à l’esprit même inconsciemment (?!) à ce que figurassent les deux termes de “UE” et in fine d’“inversion”, – bien que ‘reverse’ signifie sans aucun doute ‘inverse’ et nullement ‘inversion”. Disons que c’est mon analogie à moi, et je vais m’en expliquer aussitôt.

Bien entendu, je prends le mot “inversion” dans le sens nietzschéen, laissant le modus vivendi de l’équipe LGTBQ complètement de côté. Je parle ici de choses d’une certaine hauteur : “inversion des valeurs” revient au “renversement des valeurs” de Nietzsche, à part qu’il est pris ici paradoxalement, ou à contre-sens. L’“inversion” dont je parle est d’ordre allégorique et a pour objet le sens des choses par rapport à ce que je considère comme l’ordre, la stabilité et l’harmonie du monde ; elle est d’ordre moral dans le champ de la métaphysique, et absolument symbolique d’une époque qui est celle des temps-devenus fous. En d’autres mots, l’inversion dont je parle et qui est le caractère de l’époque est autant subversion que déstructuration.

C’est ainsi que je crois qu’on peut définir l’UE comme inversion pure. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce qu’elle sacrifie à un “culte du cargo”, – car l’UE est bien à considérer comme une sorte de “culte” dans le sens religieux primaire du terme, – mais elle l’est dans l’ordre de l’inversion qui est alors, totalement et absolument, perversion pure. Ainsi attend-elle du gaz de la Russie, notamment pour se chauffer en hiver, en faisant tout ce qu’il faut, directement et indirectement, pour empêcher ce gaz de “couler à flots”. Ainsi accuse-t-elle la Russie d’intentions malignes et agressives en faisant tout ce qui est en son pouvoir pour appliquer des intentions malignes et agressives dans la politique qu’elle développe à l’égard, – ou plutôt à l’encontre de la Russie. Ainsi son inversion est-elle absolument une perversion : toutes ses accusations contre la Russie, même si la Russie n’est pas sans reproche, sont absolument, plus que des mensonges, de complets simulacres constitués d’une perversion de la réalité qui se synthétise en une inversion totalitaire dont on est conduit à considérer que c’est la nature même de l’UE en tant qu’elle se constitue en une entité bureaucratique.

Elle rejoint bien entendu dans cette activité l’association NATO-Inc., du Parrain (américaniste), dont l’une des activités, selon une blague de l’un ou l’autre dessinateur humoristique répandu, est d’enserrer les frontières russes dans un carcan de pays hostiles, de bases armées et d’escadres navales en accusant Moscou d’enfermer dans un carcan  de pressions hostiles ses frontières, ses installations militaires et ses escadres navales. En fait, l’UE exprime son appartenance au bloc-BAO et à la civilisation qui va avec dans l’activité, en toutes choses,  de l’inversion du sens des choses.

Cette posture est également intérieure. Par exemple, l’UE se bat depuis toujours, avec l’aide benoîte et empressée de ses victimes, pour supprimer les frontières entre ses membres (l’“espace-Schengen”) selon la promesse que l’UE sera elle-même affirmée par les frontières collectives de tous ordres du bloc dont l’étanchéité et le contrôle, clef sur porte, seront  assurées avec la plus grande fermeté par elle-même. Elle n’a de cesse de pratiquer là-dessus la politique inverse, par exemple pour s’assurer que le bloc européen ressemble à une passoire par où déferlent les migrations, par où les entreprises européennes sont piratées en toute sécurité par des forces extérieures, en couvrant tout cela d’une puissante cuirasse faite de la “moraline” au sens nietzschéen critique, inversion d’une morale vraie.

La situation sur la frontière Est connaît aujourd’hui un sommet de tension comme produit de cette inversion qui touche tous les acteurs et toutes les circonstances en produisant des effets parfois étranges dont la cause première est bien la politique migratoire de l’UE, utilisée ici comme arme, là comme danger, ici et là comme une source d’explosion terrible. Elle oppose la Pologne et la Biélorussie, à propos de migrants, entre une Pologne qui déteste les migrants et l’UE et qui en appelle à l’UE pour la protéger des migrants venant de son Est qu’elle déteste (la Russie derrière la Biélorussie) alors que cet Est se constitue comme le pire ennemi de l’UE, que l’UE ne cesse d’accabler d’accusations de moraline et de sanctions qui constituent si parfaitement l’arme des lâches, des usuriers et des boutiquiers.

Il ne s’agit pas d’une politique délibérée mais d’une forme de l’esprit ; non pas une perversion de l’esprit qui peut aller en désordre dans n’importe quel sens, mais bien une inversion du sens de l’esprit, – ce qui est paradoxalement affirmer “un sens”. Effectivement, ce phénomène a un sens, exactement comme la ‘cancel culture’ en a un, qui est d’annuler tout ce qui fait sens et qui ne soit pas d’elle-même : le sens de l’annulation du sens des choses.

Je répète qu’aucune volonté, encore moins la moindre politique n’est imposée à cette entité. L’UE étant une bureaucratie de la postmodernité-tardive, elle fonctionne comme les bureaucraties similaires, du bloc-BAO. Ce n’est pas un hasard si deux hommes si différents jusqu’à être des adversaires, sinon des ennemis, emploient les mêmes mots et expriment les mêmes idées qu’on peut utiliser pour l’UE, pour caractériser l’inversion des sens caractérisant ces choses, – des comportements, des buts, des idées, des taches…

Donald Rumsfeld, parlant de la bureaucratie du Pentagone, le 10 septembre 2001, le jour d’avant l’événement qui le fit taire dans ce qu’il pouvait avoir de lucidité :

« Notre sujet aujourd’hui est un adversaire qui constitue une menace, une sérieuse menace, contre la sécurité des États-Unis d’Amérique. Cet adversaire est un des derniers bastions de la planification centralisée. Il gouverne en édictant des plans quinquennaux. D’une seule capitale où il se trouve, il tente d’imposer ses exigences au travers des fuseaux horaires, des continents, des océans et au-delà. Avec une brutale constance, il bâillonne la pensée libre et détruit les idées nouvelles. Il désorganise la défense des États-Unis et met en danger les vies des hommes et des femmes en uniforme.

» Peut-être cet adversaire paraît ressembler à ce que fut l’Union Soviétique, mais cet ennemi s’en est allé : nos ennemis sont aujourd’hui plus subtils et plus implacables. Vous devez penser que je suis en train de décrire un de ces dictateurs décrépits qui survivent encore. Mais leur temps est passé, à eux aussi, et ils ne font pas le poids à côté de cet adversaire que je décris.

» Cet adversaire est beaucoup plus proche de nous. C’est la bureaucratie du Pentagone. Non pas les gens mais les processus. Non pas les hommes et les femmes en uniforme mais l’uniformité de la pensée et de l’action que nous leur imposons bien trop souvent… »

Et Dimitri Rogozine, qui fut ambassadeur russe à l’OTAN dans les années 2008-2013, et qui fit cette remarque à propos de cette organisation, qui a un curieux air de parenté avec Rumsfeld-9/10 :

« Pris individuellement, [les bureaucrates et fonctionnaires affectés à l’OTAN] sont des gens normaux, mais quand ils sont considérés collectivement ils sont l’incarnation du diable. [L’OTAN] est une relique de la Guerre froide. Ce qu’ils font à l’encontre de la Russie, ses allié, ses partenaires, cela va vraiment trop loin. Ils construisent ouvertement non pas vraiment des capacités militaires qu’une rhétorique militariste [agressive]. Il n’y a en fait rien du tout derrière tout cela, à part l’intérêt égoïste de justifier leur propre existence. L’OTAN n’a aucune utilité en tant qu’organisation. L’OTAN aurait dû être dissoute depuis longtemps, le président russe l’a déjà dit.

» Les dernières vingt et quelques années sont devenues une menace pour l’existence de l’OTAN parce que, après la dissolution de l’URSS au début des années 1990, l’Alliance Atlantique a perdu toute justification pour son existence. Quand de nouvelles difficultés apparaissent dans les relations internationales, ils sont ouvertement très satisfaits, ils sont heureux de montrer que quelqu’un a besoin d’eux. En principe, cette organisation n’a été créée que pour les conflits, les guerres, pour constamment aggraver la situation… »

Dans les deux cas, il est indirectement ou directement fait allusion à une appréciation maléfique, au “diable” lui-même pour Rogozine. Ces constats sont proposés ici sans esprit d’un jugement politique ou idéologique, mais simplement comme des constats de la catégorie des enquêtes ontologique qui ne cessent de nous presser et de nous solliciter. (Du type : mais de quoi les bureaucraties du bloc-BAO sont-elles le nom, si elles ne produisent que de l’inversion de tout sens, allant jusqu’à suggérer une nouvelle doctrine célébrant le mariage du Vide et du Rien : l’inversionnisme [sans allusion voilée], ou “Le voyage de noce du Vide et du Rien, et retour”.)

Tous ces avis renvoient à une appréciation extrahumaine que nous avons également ressentie lors de la crise grecque, ou l’UE écrasant la Grèce, une sensation d’un événement de nature diabolique, de pur inversionnisme. Marine Le Pen, parfois inspirée, en parlait en juillet 2015 en ces termes, où le mot “secte” renvoie au mot “culte” et à toutes ces sortes de choses qui sont à classer dans cette catégorie de l’inversion :

« Les Européens doivent décider s'ils veulent continuer à vivre dans des démocraties ou s'ils acceptent de vivre dans ce qui apparaît de plus en plus comme une secte, a déclaré dimanche la présidente du Front national Marine Le Pen sur Sud Radio. “L’Union européenne a fait une pression inouïe sur les Grecs”, a déploré Mme Le Pen, se demandant si l’UE n'allait pas “imposer” à la Grèce un “gouvernement de technocrates”. “La vraie question est de savoir si on veut continuer à vivre dans des démocraties ou si on accepte de vivre dans ce qui apparaît de plus en plus comme une secte”, a indiqué Marine Le Pen. “L’Union européenne est devenue une véritable secte où on passe du lavage de cerveau, aux menaces, au chantage permanent…” »

L’inversion est pour moi, dans les conditions où on la voit se développer à son paroxysme sous la pression formidable du réflexe diabolique d’inversion que nous connaissons depuis le début de 2020 (GCES), comme une sorte de précipité au sens chimique, qui nous découvre le diable lui-même apparaissant dans toute sa furieuse majesté en inversion. Cela est dû à la force terrible de surpuissance du diable qui atteint enfin les rives de son autodestruction, et qui festoie en hystérie furieuse, assuré d’avoir enfin atteint son but…

Pour me dédouaner de toutes ces niaiseries et calembredaines suscitant & encombrant mon humeur enfiévrée, à l’ombre de Newton dont “J.C.” nous révèle la parenté avec “son” René Thom (voir le ‘Forum’ du 10 octobre 2021 revisité hier), – je m’abrite derrière mon Guénon favori (combien de fois ne l’ai-je cité tant il tranche bien et d’un coup sec tous les mystères de notre métaphysique cosmologique, en quelques mots) ; ce Guénon qui nous explique tout et fort simplement à propos de ce précipité révélant la véritable nature de la chose, de ces temps-devenus-fous :

« L’on dit même que le diable, quand il veut, est fort bon théologien ; il est vrai, pourtant, qu’il ne peut s’empêcher de laisser échapper toujours quelque sottise, qui est comme sa signature… »

La Grande Crise métaphysique éclairée et dévoilée par la simplicité catastrophique de la sottise, ou “bêtise-métahistorique”. « Bon Dieu… Mais c’est bien sûr ! »

Source: Lire l'article complet de Dedefensa.org

À propos de l'auteur Dedefensa.org

« La crisologie de notre temps » • Nous estimons que la situation de la politique générale et des relations internationales, autant que celle des psychologies et des esprits, est devenue entièrement crisique. • La “crise” est aujourd’hui substance et essence même du monde, et c’est elle qui doit constituer l’objet de notre attention constante, de notre analyse et de notre intuition. • Dans l’esprit de la chose, elle doit figurer avec le nom du site, comme devise pour donner tout son sens à ce nom.

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