RapSit-USA2021 : Sanctions sécessionnistes

RapSit-USA2021 : Sanctions sécessionnistes

RapSit-USA2021 : Sanctions sécessionnistes

Voici un nouveau élément de désordre dans le développement du désordre intérieur et potentiellement sécessionniste des Etats-Unis : la ville de Portland, capitale de l’Oregon, devrait mettre en action, à partir de demain, un train de sanctions contre le Texas que lui propose son maire. Comme le remarque ‘SouthFront.org’, qui développe l’information concernant Portland, il s’agit d’un phénomène caractéristique d’extension sauvage et inverti de la politique extérieure des USA (inversion parce que cette politique “sauvage” suivie par les USA pour ses propres intérêts se retournerait contre ces mêmes intérêts en activant une logique de désintégration sécessionniste) : « La fameuse stratégie de sanction des États-Unis en matière de politique étrangère est désormais utilisée pour les questions internes du pays. »

D’un point de vue de la “politique sociétale” et idéologique, cette initiative originale et potentiellement explosive est marquée d’une complète logique : l’Oregon, avec sa capitale Portland, est sans doute l’État le plus progressiste-sociétal des USA, le Texas l’un des plus conservateurs, avec des réactions de plus en plus vives contre cette politique progressiste-sociétale qui est partie intégrante du courant de l’idéologie du wokenisme. L’Oregon s’oppose à la loi que le Texas vient d’activer de limiter les avortements à six semaines de grossesse, et il opérationnalise ainsi l’une des questions centrales (et sécessionnistes) que l’actuelle radicalisation idéologique pose d’une façon très pressante : comment deux États aussi idéologiquement opposés du point de vue idéologique peuvent-ils vivre au sein de la même Fédération (dite-Union) ? Cela, alors que la politique fédérale s’est elle-même idéologisée à l’extrême et que l’instance suprême (la Cour Suprême) est extrêmement réservée à l’égard de cette idéologisation puisqu’elle a voté mercredi dans le sens d’un refus d’intervenir contre la loi sur l’avortement du Texas ?

« La loi controversée du Texas, qui interdit les avortements à partir de six semaines, est désormais en vigueur.  Elle a été promulguée en mai dernier par [le gouverneur] Greg Abbott. Elle a été largement critiquée non seulement par les défenseurs des droits des femmes, les militants de l'avortement et les prestataires de services d'avortement, mais aussi par les responsables d’autres États [de l’Union]. Ainsi, le conseil municipal de Portland devrait adopter [demain] une résolution d'urgence visant à interdire les biens et services en provenance du Texas, en raison de la nouvelle loi sur l'avortement dans cet État. Le conseil examinera cette résolution demain.

» Le 3 septembre [au lendemain du vote de la Cour], le maire de Portland, Ted Wheeler, a fait part de son intention “d’interdire à la ville de se procurer des biens et des services auprès de l'État du Texas et d’interdire les voyages d'affaires des employés municipaux dans cet État”.  Cette interdiction devrait être en vigueur jusqu'à ce que le Texas “retire son interdiction inconstitutionnelle de l'avortement ou jusqu'à ce qu'elle soit annulée par les tribunaux”.

» Wheeler a expliqué : “Le conseil municipal de Portland est uni dans sa conviction que toutes les personnes devraient avoir le droit de choisir si et quand elles portent une grossesse et que les décisions qu'elles prennent sont complexes, difficiles et uniques à leurs circonstances. Il y a près de 50 ans, la Cour Suprême a statué pour protéger l'avortement sûr et légal. Tard mercredi soir, la Cour a refusé de bloquer une loi texane interdisant les avortements après seulement 6 semaines de grossesse. Cette décision, prise à 5 contre 4, permet au Texas d'interdire environ 85 % de toutes les procédures d'avortement dans l’État.”

» Wheeler a également appelé les autres dirigeants américains à se joindre à l'effort de Portland pour punir l’État du Texas.

» Le Texas est l’un des États les plus conservateurs des États-Unis, qui n’a pas voté pour un démocrate à la présidence depuis 1976. Le clivage politique aux États-Unis s'approfondit et les deux camps sont sur le point d'utiliser la guerre économique. »

Les commentateurs-Système, que leur crétinisme bienpensant chronique aveugle sur l’essence de ces choses, ont tous défailli à la nouvelle de la Cour Suprême. Malgré les sels, le traumatisme demeure. Au demeurant, justement, ce vote à 5-4 met en évidence sur un cas d’une extrême sensibilité pour l’idéologie courante et l’évolution progressiste des mœurs la position réelle de la Cour dans sa composition révisée de l’administration Trump (deux nouveaux juges [conservateurs] nommés pour remplacer deux décès, selon le processus constitutionnel normal).

La Cour avait refusé d’intervenir lors de querelles d’État à État après l’élection de novembre 2020, par contre elle le fait selon sa composition métapolitique sur des questions de mœurs et d’éthique. Ce point va raviver la fureur démocrate et la poussée du parti pour modifier la composition de la Cour (passer de 9 à 14 juges en nommant des juges progressistes), mais à un moment où l’administration Biden est en plein désarroi à la suite de la crise afghane et où le temps presse avec le rapprochement des élections mid-term. La partie sera infiniment plus difficile à jouer, alors que les démocrates avaient au départ abandonné leur projet dans ce sens devant la difficulté de le conduire à bien, et alors que les républicains seront d’autant plus à l’aise pour résister, justement à cause des difficultés internes Biden-démocrates et des échéances électorales.

Sur le fond (Portland vs Texas), la situation est brusquement étalée dans toute sa gravité. La stupidité de la politique américaniste, dans tout son nihilisme opérationnalisé par le réflexe bovin du déterminisme (ne peut-on parler alors de “déterminisme-nihilismiste” pour le plaisir du néologisme et le refus des mots usés à force d’usage [“nihiliste”] ?), sert donc plus que jamais de méthodologie pour accentuer les chemins de la désintégration et de la sécession.

Dès demain si le Conseil vote dans ce sens, Portland serait alors l’incendiaire faisant jurisprudence du sécessionnisme en offrant une politique agressive de rupture, sans passer par les pratiques hors-bienpensantes de la guerre civile armée et en approfondissant la piste séduisante de la “guerre civile de communication” vers sa transmutation. Il conviendrait alors de juger assez probable que, sous la poussée exacerbée du wokenisme sociétal-progressiste, l’État de l’Oregon suive cette voie en envisageant une telle politique d’État à État, ou plutôt d’État contre État. Dans ce cas spécifique de l’Oregon, cela pourrait alors provoquer un effet indirect d’accélération de la demande déjà officiellement formulée de quelques 3 ou 4 comtés conservateurs de l’Est de l’État d’être détachés de l’Oregon et rattachés à l’Idaho voisin oriental (devenant alors Grand-Idaho).

Reste à voir si le Texas cédera aux sanctions de Portland. Cela nous étonnerait immensément du fait que le Texas est le Texas, c'est-à-dire un grand État qui ne lésine pas sur son nationalisme-régionaliste ;  que les élections sont proches ; que la forte présence des Latinos catholiques que les démocrates ont cru un peu vite acquis à leur cause n'implique en aucune façon une opposition conséquente à la loi de restriction de l'avortement. Cette hypothèse (un Texas en repli) est vraiment très peu probable.

Il est très difficile, compte tenu de l’entêtement roboratif du commentateur antiSystème que nous sommes, de ne pas envisager par contre l’hypothèse de l’entraînement d’une telle initiative, compte tenu du climat exacerbé jusqu’à l’hystérie qui entoure ces questions progressistes-sociétales aux USA. Le “génie” de la mesure proposée par le maire de Portland, c’est qu’elle offre une formule d’irresponsabilité chère aux directions américanistes : pratiquer une violence sans violence apparente, avec une marchandisation de la violence sous la forme de “sanctions”. Ainsi, la vertu cardinale de la modernité de l’apparent refus de la violence est sauve, grâce à l’usage extensif de cette autre vertu moderniste qu’est l’hypocrisie.

… Bref, la formule pour une mutation de la “guerre civile de communication” en “guerre sécessionniste de communication” nous est offerte.

 

Mis en ligne le 7 septembre 2021 à 14H05

Source: Lire l'article complet de Dedefensa.org

À propos de l'auteur Dedefensa.org

« La crisologie de notre temps » • Nous estimons que la situation de la politique générale et des relations internationales, autant que celle des psychologies et des esprits, est devenue entièrement crisique. • La “crise” est aujourd’hui substance et essence même du monde, et c’est elle qui doit constituer l’objet de notre attention constante, de notre analyse et de notre intuition. • Dans l’esprit de la chose, elle doit figurer avec le nom du site, comme devise pour donner tout son sens à ce nom.

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