Attaque de Natanz: le facteur humain, encore et toujours

Attaque de Natanz: le facteur humain, encore et toujours

Sans surprise aucune, les multiples actes de sabotage ayant visé des installations iraniennes hautement sensibles ou stratégiques ont été menés grâce à des réseaux d’agents locaux. Le facteur humain est donc déterminant dans la réussite de ce type d’opérations.

Les télévisions iraniennes ont diffusé l’identité d’un des chefs des cellules humaines dormantes suspecté d’avoir joué un rôle directeur dans l’opération du sabotage du site nucléaire iranien de Natanz, l’un des sites les mieux protégés du pays. Il s’agit du dénommé Reza Karimi, âgé de 43 ans. Ce dernier aurait réussi à se faire exfiltrer d’Iran avant l’explosion des charges explosives ayant détruit les générateurs d’énergie électrique et les systèmes d’appoint et d’urgence du site nucléaire iranien.

Le même suspect qui aurait été recruté par les services de renseignement israéliens il y a une dizaine d’année peu après la révolution colorée avortée de 2009 (dite “verte”) aurait introduit physiquement des clés USB contenant des virus informatique offensifs de nouvelle génération. C’est grâce à l’introduction physique d’un support mémoire que le réseau Intranet de l’agence iranienne de l’énergie nucléaire et celui du ministère du renseignement furent affectés par une cyberattaque plus foudroyante que celle de Stuxnet.

Il est inutile de répéter que lorsqu’il s’agit d’opération de ce type et de cette envergure, c’est toujours les bonnes vieilles méthodes du recrutement d’agents humains sur site qui s’avèrent les plus efficaces en dépit des aléas liés au facteur humain. L’attaque de Natanz n’était le résultat ni d’une cyberattaque par réseau, ni de l’usage d’armes spatiales et encore moins de drones furtifs: ce fut le fait d’une cellule d’agents, tous de nationalité iranienne, nés et ayant grandi en Iran, recrutés par le Mossad ou la CIA et supervisés par des officiers traitants issus de la même culture et parlant le même langage. Il suffit qu’un ingénieur ou technicien disposant d’un accès spécial à un site sensible soit approché puis recruté en se basant sur une étude de son profil psychologique, ses frustrations ou son ressentiment pour que tout un programme industriel ou technologique puisse être affecté par des actes de sabotage. Le Mossad n’a donc rien inventé et ne dispose pas de moyens extraordinaires pour atteindre le site souterrain fortifié de Natanz. Les iraniens le savent parfaitement et sont conscients que la crise économique et sociale aggravée par le régime des sanctions internationales facilite le ressentiment et la frustration au sein des populations, d’autant plus si des catégories s’estiment lésées par la répression sécuritaire qui accompagne chaque tentative de révolution colorée ou de guerre hybride exogène.

Indubitablement, le suspect Reza Karimi est loin d’être un cas isolé. Le ministère iranien du Renseignement pourchasse sans aucun répit des dizaines de cellules d’agents responsables d’incendies subites d’installations industrielles, de sabotage de la chaîne alimentaire, d’assassinats ciblés et plus récemment, l’utilisation d’un drone doté d’un fusil mitrailleur et de grenades pour l’assassinat d’un haut responsable militaire.

Ces pratiques sont loin de se limiter à l’Iran et sont monnaie courante dans la plupart des pays dits cibles, pas suffisamment connectés à Internet ou au contraire disposant d’un solide firewall. Ou encore des pays difficiles à pénétrer par des voies conventionnelles (faux hommes d’affaires sollicitant un visa Business, fonctionnaires infiltrés d’instances internationales comme l’AIEA ou l’OMS, faux aventuriers passionnés de trail ou de photographie, universitaires, etc.). De ce fait, ni les satellites espions ni les moyens d’écoute électronique ne peuvent se substituer à l’agent humain capable d’accéder au site ciblé.

Cette affaire fait grand bruit en Iran où l’activité subversive de traîtres à leur pays n’hésitant pas à vouloir détruire l’un des fleurons technologiques du pays est d’autant plus condamnée qu’elle facilite le travail de sape d’ennemis déclarés hostiles non seulement à la République islamique mais à l’héritage de la Perse millénaire. La chasse à l’homme déclenchée par les services spéciaux iraniens en plein mois sacré du Ramadan va sûrement provoquer des retranchements ou des accrochages avec des cellules de second niveau que leur statut ne permet pas à leur recruteurs d’exfiltrer comme ce fut le cas de Karimi, considéré donc comme un élément de haute importance pour le Mossad et la CIA. L’éventuel retrait de sa fiche de recherche international auprès d’Interpol signifierait qu’il est extrêmement important dans l’organigramme clandestin des réseaux du Mossad/CIA au Moyen-Orient.

Enfin et non des moindres, ce type d’opération confirme une nouvelle fois l’extrême dangerosité des supports mémoire ou clés USB fabriqués à Taïwan. Certains de fabriquants taïwanais de ce type d’équipements informatiques collaborent fréquemment avec des unités de cyberguerre israéliennes.

C’est cela aussi la guerre hybride asymétrique: un élément humain disposant d’un accès et une clé USB.

La guerre souterraine fait rage entre Israël et l’Iran pour brider les capacités de ce pays à négocier un éventuel accord nucléaire ou, si tout s’écroule, à opter ouvertement pour une voie similaire à celle, fort réussie, de la Corée du Nord.

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