LE CAPITAL FICTIF SE DÉVELOPPE VERS L’IMPASSE DE LA DETTE PERPÉTUELLE

LE CAPITAL FICTIF SE DÉVELOPPE VERS L’IMPASSE DE LA DETTE PERPÉTUELLE

En ce début 2021, il me paraît nécessaire de faire le point sur les dernières évolutions de ce que l’ on appelle la finance mondiale et le capital fictif .

Si l’année 2020 fut touchée marquée par la pandémie mondiale du coronavirus, elle fut aussi atteinte par la maladie virale de l’endettement à perpétuité et par la découverte d’ un vaccin (la MMT) pour la guérir selon l’usage voulant qu’il faut soigner le mal par le mal.

Et bien nous y voilà, la solution moderne nous est encore une fois venue d’ Amérique sous le nom de Théorie monétaire moderne (MMT) de Stéphanie Kelton,

Tous les pays de l’ OCDE l’ont finalement adopté. Les partisans de la MMT pensent que la monnaie est un monopole public dont ils peuvent user à leur guise « sans limite ». Cette idée n’ est pas nouvelle comme le souligne Nick Beams dans son article (La théorie monétaire moderne (MMT) et la crise du capitalisme )

« En 1924, l’économiste allemand Georg Friedrich Knapp a avancé une nouvelle théorie de la monnaie. Il soutenait que l’argent ne provenait pas de la production de marchandises et n’avait pas de valeur intrinsèque. C’était un jeton créé par les gouvernements comme moyen de paiement pour les obligations fiscales qu’ils imposaient. Cette théorie, connue sous le nom de chartalisme1 (dérivé du mot latin charta, qui signifie « jeton »), est à la base du MMT. » (Nick Beams)

Nous avons vu dans nos précédents articles comment la BCE a fait voler en éclats les traités de Maastricht et de Lisbonne, comment en Allemagne une fraction du capitalisme allemand a cherché à résister, en vain. Tout cela pour finir par nous chanter les louanges du MMT et de sa dette perpétuelle non remboursable. P. Artus dans un interview Oui, la dette explose mais elle n’aura pas à être remboursée ! nous explique de long en large pourquoi la dette n’ est pas forcément remboursable. Dans le même sillage le groupe Mélenchon résolution nº 2914 efface la dette d’un coup de baguette magique.

 

« La solution que nous proposons est pragmatique. D’abord la transformation de la dette actuelle des États par la banque centrale européenne en dette perpétuelle à taux nul. Aujourd’hui, 18 % de la dette publique française est stockée à la banque centrale. Sa transformation en dette perpétuelle permettrait d’effacer pour notre pays le coût de la crise sanitaire. Cela peut se faire immédiatement. La Banque centrale européenne pourra ensuite augmenter sa politique de rachat des dettes publiques sur le marché secondaire pour les geler petit à petit. Cette opération ne nécessite pas de changer les traités européens. » (…)« Monétiser la dette par la banque centrale est la solution la plus raisonnable, la seule sérieusement envisageable. Elle est plus pertinente que jamais. Sinon quoi ? Va t on pendant les cent prochaines années n’avoir d’autre projet de société que de payer une dette contractée pour payer les dégâts de l’ère productiviste à l’heure où il faut investir pour sortir de cette façon de produire et d’échanger. » ( extraits de la résolution nº 2914)

 

Il ne fait pas de doute que pour le capital financier « Monétiser la dette par la banque centrale est la solution la plus raisonnable, la seule sérieusement envisageable. » Ceci dénote que le capital fictif fait ici figure de « dernier métro » pour la finance mondiale en détresse. Avec le dit « Grand Reset » ils vont essayer une sortie de crise. Pour éponger les dettes ( les bonnes2 comme les mauvaises) le capital financier va d’abord consolider son assise mondiale par le truchement des banques centrales, qui maintenant font figure de dernier recours pour capter la monnaie mondiale et superviser le crédit. Ce n’ est certes pas un hasard si la BCE, puis la Banque des banques centrales, la BRI envisagent de passer à la monnaie numérique de détail.

 

Ce grand requiem de la finance mondiale n’ est que l’ aboutissement d’une longue agonie, dont les fondements proviennent de ce que la composition organique du capital ,est suffisamment élevée pour que toute innovation technologique qui vise l’ extraction de plus-value relative tend à dévaloriser-transférer en fictivité-davantage de capital fixe qu’elle produit de plus-value apte à être transformée en profit, intérêt et rente foncière.

 

Autrement dit la machinerie (Robotique et NTCI) permet une augmentation de la productivité, cette productivité produit de la plus-value relative tout en provoquant une dévalorisation des forces de travail à l’ échelle mondiale. Comme la plus-value provient de l’ exploitation du travail humain, plus la machinerie exclu ce travail humain source d’ enrichissement du capital , plus ce dernier se retrouve face à lui même en sciant la branche sur laquelle il est assis. Il est alors contraint de procéder à un « enrichissement fictif » par la dette et l’ expansion du capital fictif afin d’ empêcher la dévalorisation du capital.

 

 

La dette devra être remboursée

Tout le monde connaît l’ expression « Qui paye ses dettes s’enrichit » mais à l’Ère du capital fictif le retournement dialectique la transforme en son contraire « qui fait de la dette s’enrichit »

Tout d’ abord réaffirmons que malgré les discours, les gouvernements ne vont pas exonérer les citoyens du remboursement de « la dette » dite souveraine3 et s’ il le faut ils piocheront dans l’ épargne des citoyens.  A la question, faudra-t-il rembourser la dette ? Voici ce que répond Agnès Bénassy-Quéré chef économiste de la DG du trésor.

« Mais au fait, faudra-t-il rembourser la dette ? La réponse juridique et financière est oui : une dette est un contrat qui doit être honoré. L’Etat ayant la capacité de lever l’impôt, les marchés financiers lui font en général confiance pour honorer ses engagements. En retour, l’État s’appuie sur les marchés pour rembourser ses anciennes dettes en émettant de nouvelles dettes. Les États n’aiment pas faire défaut pour au moins trois raisons. Premièrement, cela rend plus difficile le financement de leurs déficits résiduels. Deuxièmement, les difficultés de financement d’un État en défaut contaminent immédiatement le financement des entreprises. Troisièmement, un défaut fait perdre de l’argent aux épargnants du pays. »Dette publique : qui va payer ?

Pour le moment, les mesures visant à faire payer la dette souveraine apparaissent comme très favorables aux emprunteurs notamment les entreprises, les gouvernements, les particuliers pour l’ achat d’immobilier (intérêts plus bas et sur des durées plus longues) Mais ces mesures nous les connaissons biens depuis la crise financière de 2008 visant à sauver le noyer en lui faisant boire de l’eau, c’est-à-dire du capital fictif à gogo en espérant qu’il sera au final valorisé dans le temps.

Les partisans de la MMT développent cette idée et trouve un répondant auprès de la « gauche de la dévalorisation » comme le parti de gauche de Mélenchon et autres. Comment est il possible de s’enrichir de la dette ? C’ est ce que font les banques quand elles octroient un prêt immobilier dont il faut rembourser les intérêts en premier et ensuite le principal. A une échelle supérieure celles des États c’est le même processus l’ État emprunte à la banque centrale « de la monnaie banque centrale » qu’il devra rembourser comme pour un achat immobilier sauf que les États sont aussi actionnaires des banques centrales et de ce fait vont toucher des intérêts en tant qu’ actionnaires. Ce petit jeu d’équilibriste peut effectivement fonctionner un temps. Par exemple quand la Banque de France (BdF) achète des titres de la dette publique, les intérêts perçus sur ces titres vont se partager entre la BdF et la BCE comme l’ indique ci dessous la BdF elle même.

 « Pour le programme PSPP, 90% des titres sont achetés par les banques centrales nationales (dont la Banque de France) et 10% par la BCE directement. Les achats par les banques centrales nationales de titres publics de leur juridiction sont en risque propre et en revenus non partagés à hauteur de 80% des encours de détention PSPP. Les trois autres programmes d’achat sur titres (SMP, ABSPP, CBPP3) sont par construction en risques partagés. Les intérêts perçus par la BCE contribuent à son résultat, qui est reversé via le dividende aux banques centrales nationales actionnaires et membres de l’Eurosystème selon une clef de répartition dite clef Eurosystème, différente de la clef de capital car recalculée pour les seuls pays membres de la zone euro. Les banques centrales actionnaires de la BCE mais non membres de l’euro ne perçoivent pas de dividende. » (Quand la Banque de France achète des titres de la dette publique française, les intérêts perçus sur ces titres de dettes vont – ils à la Banque de France ou à la BCE ?)

Il résulte in fine que le Trésor actionnaire à 100% de la BdF, va percevoir un dividende de la part de la BdF, qui comme nous venons de le voir perçoit un dividende de la BCE dont elle est actionnaire.  Le Trésor récupère ainsi une partie des profits de la BdF et de la BCE. Voilà comment la dette publique devient un enrichissement sans cause.

Il y a aussi l’ exemple des 137 milliards de dette tombant du ciel mis sur le dos de la sécu afin de faire perdurer via la CADES la ponction CSG/CRDS sur les salariés, chômeurs, retraités, voir notre article. G.Bad- L’ Etat et la Cades gèrent la dette sociale, les salariés , retraités, chômeurs banquent.    Voilà comment la dette publique est devenue un produit financier des plus sûr, classé trois AAA.

La régulation supra-étatique où la stratégie du funambule.

Alors que les États-Unis première puissance mondiale s’étaient  octroyer suite aux accords de Bretton Woods le privilège de détenir la monnaie universelle le dollar ; il se trouve que celui-ci entre en déclin relatif. Nous disons relatif dans le sens ou d’autres puissances émergent comme la Chine, s’invitant au banquet mondial des grandes puissances décisionnelles du sort du monde ( les différents G). L’ éternelle remise en cause du dollar comme monnaie de réserve est de nouveau au centre des contradictions de ce monde dominé par le capital fictif. Ce que certains appellent le « déclin de l’occident » dont ils attribuent le commencement avec les chocs pétrolier, déplacement de richesses vers les pays non occidentaux et délocalisations. Le déplacement de zone d’ accumulation du capital n’ est pas nouveau et il indique seulement que certains états entrent en crises quand d’ autres prospèrent, cette évolution est matérialisée par l’ évolution des « G » Le G6, émerge en 1975, puis devient le G7 avec l’ entré du Canada en 1976 et le G8 en 1997 avec la Russie. L’objet des différents « G » est de vouloir réguler l’ ensemble des mouvements des monnaies qui commençaient à échappé au contrôle des   États. (Aujourd’hui on parle du G20. NDLR).

De là la mise en place de superviseurs1 et des banques centrales de plusieurs pays, au sein du comité de Bâle2. Désormais tous les pays du G20 en sont membres, ses recommandations, sont de facto mises en œuvre par la plupart des banques significatives avant même leur transformation en règles étatiques les fameux Bâle I, Bâle II, Bâle III, FRTB

A la fin du XXe siècle, des formes de régulation supra-étatiques émergent sur la base des risques souverains6 et des crises dites régionales ( Amérique latine, Asie, Russie) La création de valeur financière devient le critère de jugement prévalant sur la performance d’entreprise, et c’est au nom de cette valeur que des financiers achètent et démantèleront RJR Nabisco à la fin des années 1980, ce qui leur vaut d’être surnommés « les barbares » par le Wall Street Journal.

Au tournant du XXIe siècle, d’autres barbares sont emportés par la déconfiture de grandes entreprises qu’ils avaient portées au pinacle de la Bourse : Enron et WorldCom. On croit alors réguler pour éviter à jamais ce type de crise, c’est ce que fit le président Bush en signant la loi Sarbanes-Oxley. Six ans plus tard, en 2008, le monde connaissait la crise financière la plus violente et la plus globale depuis la crise de 1929. Depuis cette crise, le risque souverain a gagné les pays de l’ UE à tel point que l’euro lui même fut menacé dans son existence même et qu’il fut nécessaire pour le sauver de pratiquer en grand la politique dite « non conventionnelle » du « quantitative easing » (QE) ou « assouplissement quantitatif »  c’ est à dire l’injection massive de liquidités dans le système financier.

Bien avant la « crise covid 19 » le risque souverain planait au-dessus des pays de l’OCDE et la pandémie est arrivée comme la fée clochette pour balayer les dernières résistances visant à ouvrir la boite de pandore de la création monétaire illimitée.

Le confinement des populations a conduit à une chute très importante de la production et on attend un recul du Produit Intérieur Brut (PIB) de 7 % en 2020 pour l’ensemble de l’OCDE. Endettement qui ne fait qu’augmenter l’exposition des banques aux risques souverains. Ce risque nous auront l’occasion de le constater prochainement, va s’amplifier, continuant à enfler les bilans des banques et banques centrales. La récession va accroître le risque souverain, et il ne faut pas compter sur le fil d’ Ariane de la « révolution verte » pour une relance. La récession déjà présente avant la crise va se poursuivre avec les affres d’une paupérisation de la classe moyenne venant s’ ajouter à celle des travailleurs pauvres. Une situation mondialement explosive nassé préventivement par des couvre feu et état d’urgence sanitaire le tout accompagné de lois liberticides.

G.Bad


Notes

Source: Lire l'article complet de Les 7 du Québec

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