Basilique Saint-Clément: Un hymne à la vie

Basilique Saint-Clément: Un hymne à la vie

Fons hic est vitae qui totum diluit orbem sumens de Christi vulnere principium.

Ici est la source de la vie qui lave le monde entier en tirant son origine des plaies du Christ.

Inscription baptismale attribuée à saint Leon le Grand, Ve siècle.

Les dernières semaines ont vu défiler les fêtes des dédicaces des grandes basiliques de Rome : Saint-Jean-de-Latran, Saint-Pierre et Saint-Paul-Hors-Les-Murs. Ce sont là trois églises phares de la catholicité et toutes trois d’importants monuments de la Ville Éternelle. Chacune d’elles mérite d’être visitée lentement, avec un mélange d’émerveillement et de contemplation. J’ai cependant reculé devant le travail herculéen qu’aurait consisté une courte immersion dans l’une ou l’autre de ces églises. C’est une expérience en soi que de faire face à la majesté et au grandiose de ses basiliques romaines, érigées pour la plus grande gloire de Dieu (et souvent du Pontife qui en avait fait la commande). 

J’ose donc espérer vous faire connaître et aimer cette autre petite merveille de l’Urbs, une autre basilique1, quoique de moins grande envergure, mais tout aussi merveilleuse: la basilique Saint-Clément-du-Latran.

Le troisième pape

Aujourd’hui nous célébrons la mémoire du troisième successeur de saint Pierre, le pape Clément de Rome. Il est l’auteur d’une magnifique Épitre aux Corinthiens, qui, à l’instar de saint Paul, les invite à tenir bon dans la foi et dans la tradition reçue des apôtres. 

En haut à droite de la mosaïque centrale, on voit saint Clément assis à côté de saint Pierre montrant l’instrument de son martyre. Photo: Emmanuel Bélanger/Copyright © 2020. Basilica San Clemente.

La tradition dit que le saint pape Clément 1er a été martyrisé sous Trajan. Devenu trop influent au sein de l’aristocratie romaine, il aurait été déporté en Crimée pour travailler dans les carrières de marbre, ce qui ne l’a pas empêché de continuer son apostolat. Exaspérées, les autorités ont décidé d’en finir une fois pour toutes en lui accrochant une ancre autour du coup avant de le jeter dans la mer d’Azov.

Plusieurs choses caractérisent la basilique Saint-Clément-du-Latran (elle se nomme ainsi dans notre chère langue). Le lieu où elle s’érige a tout d’abord vu les fondations d’un entrepôt de la Rome républicaine, un sanctuaire du dieu Mithra sous la Rome impériale, une basilique de la fin du Ve siècle et, finalement, une autre médiévale au début du XIIe siècle. Les trois niveaux superposés l’un sur l’autre sont visibles grâce à des fouilles qui se sont étalées sur près d’un siècle, de la moitié de 1857 à 1945. 

L’épée de la vie

Voilà pour l’histoire. Cependant, ce n’est pas à proprement parler ce qui nous intéresse ici, mais bien plutôt la mosaïque centrale de l’abside qui regorge de symboliques, de couleurs et de vie.

Cet époustouflant ouvrage de la basilique Saint-Clément, véritable hymne à la création, est le paradigme de la joie de l’Évangile et de son rayonnement sur ce monde de ténèbres.

Basilique Saint-Clément
L’abside, l’autel et son baldaquin marqué en son pinacle par l’ancre. Photo: Emmanuel Bélanger/Copyright © 2020. Basilica San Clemente.

Comme le faisait si joliment remarquer G.K. Chesterton dans son ouvrage The Resurrection of Rome, on dirait que la main de Dieu semble prendre la croix par le haut et l’enfoncer telle une épée dans la terre : « Pourtant, dans un sens, c’est l’inverse même d’une épée, puisque son toucher n’est pas la mort, mais la vie ; la vie germant, jaillissant et s’élançant dans les airs, afin que le monde ait la vie et qu’il l’ait plus abondamment. »

La croix est la charrue avec laquelle le Christ a ouvert la terre pour en faire jaillir, comme des fonts baptismaux, la vie nouvelle à laquelle tous sont appelés à s’abreuver. C’est de cette source que la faune et la flore, maudites par le péché, renaissent, attendent et aspirent à la révélation des fils de Dieu (cf. Rm 8, 18). 

La dynamique de la mosaïque part de la croix plantée en son centre d’où tout le reste du créé fleurit. C’est pourquoi, au travers du branchage qui s’étend de part et d’autre, figurent différents moments de la vie quotidienne, autant séculière, celle de la société, que régulière, celle des monastères. On y retrouve les moines aux offices, mais aussi, une femme nourrissant ses poules, scène qui ne sera peut-être pas étrangère à certains.

Basilique Saint-Clément
Photo: Emmanuel Bélanger/Copyright © 2020. Basilica San Clemente.

Antichambre de la Vie éternelle

Bref, les maitres-artisans de la basilique Saint-Clément (anonymes car d’une époque où l’on ne voulait pas péché par vaine gloire) ont voulu dépeindre l’entièreté de la vie comme sujette de la croix et sauvée par le Crucifié. Un Crucifié d’ailleurs qui trône paisiblement sur son supplice et semble nous dire à nous qui fixons sur lui notre regard : Je suis la résurrection et la vie !

Photo: Emmanuel Bélanger/Copyright © 2020. Basilica San Clemente.

C’est ainsi qu’un pape mort en exil noyé à la suite d’un Juif crucifié nous rappelle encore aujourd’hui, par ces pierres qui sont appelées à passer (comme tout le reste) que notre quotidien, notre travail, notre vie n’est que l’antichambre de la Vie éternelle. Mais une antichambre digne des tombeaux des pharaons, regorgeante de couleurs et reliefs. Cette vie, marquée par le sceau de la croix, a son lot de souffrances et d’épreuves, mais est vouée à une richesse et beauté véritables

Saint Clément de Rome, priez pour nous ! 


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  1. Le terme Basilique, qui n’a rien à voir avec la plante son homonyme, dérive du latin basilica lui-même venant dut du grec basilikê oikia ou stoa basilika, c’est-à-dire respectivement ‘’salle royale’’ ou ‘’portique royale’’. Il s’agissait d’un lieu couvert adjacent à l’agora (celle-ci étant la place publique principale de la cité, mais à ciel ouvert) qui servait de refuge en cas d’intempéries. C’était notamment l’endroit où le souverain (basileus) siégeait pour faire régner la justice, puis elle devint finalement un tribunal à part entière où les citoyens aimaient à se rassembler pour suivre le déroulement des affaires judicaires. C’est ainsi que les basiliques s’adornèrent de petites boutiques, où l’on pouvait en profiter pour faire ses courses entre deux jugements. C’est donc cette architecture que les églises à plan basilical reprendront à partir du IIIe siècle de notre ère.

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