L’acte d’accusation politique contre Julian Assange : un numéro de cirque minable (Counterpunch) — Binoy KAMPMARK

L’acte d’accusation politique contre Julian Assange : un numéro de cirque minable (Counterpunch) — Binoy  KAMPMARK

Le Livre d’Heures sur Julian Assange est en cours d’écriture. Mais les scribes sont loin d’être originaux. Des audiences administratives qui se succèdent sans autre but que de préparer le coup de hache final. Ces derniers temps, l’homme le plus souvent associé au projet de publication de WikiLeaks ne peut participer de manière significative, en grande partie à cause de sa santé fragile et des dangers que lui fait courir le coronavirus. Ayant déjà fait l’effort d’assister en personne à des procédures judiciaires, Assange est devenu une figure judiciaire exotique, jetée en pâture aux monstres de la foire orchestrée par la juge Vanessa Baraitser. Il s’est vu refuser une demande de sortir de sa cage de verre lorsqu’il pouvait encore assister aux audiences en personne, car lui permettre de descendre et de consulter son équipe de défense dans une salle d’audience aurait constitué une demande de mise en liberté provisoire et présenté un risque indéterminé. Cette interprétation par la juge était si novatrice qu’elle a même laissé perplexes les procureurs.

Ce que nous savons à ce jour, c’est que les restrictions et les entraves dans l’affaire Assange font partie du spectacle. Des restrictions qui ne lui permettent pas échanger avec ses avocats et de comprendre ce qui se passe sont monnaie courante. Par-dessus tout, le cirque cérémoniel auquel nous sommes habitués de la part de la justice britannique dans l’ombre menaçante de la menace américaine a pris une ampleur inquiétante. Le 27 juillet, ce cirque a offert un nouveau numéro minable. Comme auparavant, le spectacle a eu lieu au tribunal de Westminster à Londres.

Au cours de la procédure, Assange a été présenté par liaison vidéo depuis la prison de Belmarsh, avec une heure de retard toutefois, et seulement sur l’insistance de son équipe d’avocats. L’article du Guardian sur sa présence se lit comme le compte-rendu d’un événement sportif. «Portant un pull beige et une chemise rose, Assange a fini par apparaître depuis la prison de Belmarsh après une première tentative avortée.»

D’autres se sont alarmés. Lors de son audition, a noté Martin Silk de l’Australian Associated Press, «ni l’Australien, ni ses gardiens ne portaient de masque. Je ne comprends pas la raison de cela, étant donné que nous devons les porter dans les magasins». Ce point a également été soulevé par la compagne d’Assange, Stella Moris : «Belmarsh n’a pas fourni de masque facial à Julian tout au long de cette crise #covid. Les gardiens de prison avec lesquels il interagit n’en portent pas non plus.» Juan Passarelli, supporter de WikiLeaks, a également estimé qu’Assange «avait du mal à suivre les procédures parce que le juge et les avocats ne parlaient pas assez fort et dans les microphones».

L’organisation de l’audience pour les observateurs s’est avérée particulièrement négligée. La journaliste indépendante Stefania Maurizi n’a pas été impressionnée par les deux heures passées au téléphone pendant lesquelles elle «n’a pas pu comprendre plus de 20 % de ce qui s’est dit». Elle a affirmé que «les autorités britanniques ne se soucient pas du tout des journalistes internationaux qui couvrent» le procès d’Assange. «Le système d’appel est, comme d’habitude», a convenu Mme Passarelli, «un désastre !»

Cette audience administrative portait sur l’annonce faite par le ministère américain de la justice le 24 juin, à savoir un nouvel acte d’accusation qui remplace l’ancien. Ce document s’est avéré être un exercice flagrant de manoeuvre politique, n’ajoutant aucune nouvelle accusation à la liste déjà longue de dix-huit, dont dix-sept sous le coup de la loi américaine sur l’espionnage. L’étendue des accusations a cependant été élargie, notamment sur la question du «piratage» et des conférences. Assange est dépeint comme un recruteur diabolique et un saboteur de l’ordre secret international, un homme de conférences désireux d’exposer les gouvernements occultes pour différentes raisons. «Selon le document d’accusation, Assange et d’autres personnes de WikiLeaks ont recruté et convenu avec des pirates informatiques de commettre des intrusions informatiques au profit de WikiLeaks».

Edward Fitzgerald QC, un avocat d’Assange, a rempli son rôle, en soutenant que le document récemment révisé n’a guère inspiré confiance quant à la clarté de la justice. «Nous sommes préoccupés par le fait qu’une nouvelle demande soit faite à ce stade, avec les conséquences potentielles d’un déraillement de la procédure, et que le procureur général des États-Unis le fasse pour des raisons politiques». Fitzgerald a rappelé à la cour que le président américain Donald Trump avait «décrit la défense comme un complot des Démocrates».

Cela aurait dû être évident, mais Baraitser ne l’entendit pas de cette oreille. Admettre à ce stade qu’Assange est recherché pour des raisons politiques rendrait encore plus difficile son extradition vers les États-Unis, étant donné l’obstacle mentionné dans le traité d’extradition entre les États-Unis et le Royaume-Uni. Bien que Fitzgerald ait eu raison de faire cette remarque, il devrait savoir maintenant que son public est résolument constipé et indifférent à de tels arguments. Assange doit subir l’audience la plus agressive, pas la plus équilibrée. En conséquence, Baraitser a insisté pour que Fitzgerald «réserve ses commentaires» – elle qui, dans la bonne tradition de ces auditions, n’avait pas encore reçu l’acte d’accusation américain. Ce qui rendait la présence de toutes les parties à l’audience de Westminster non seulement insignifiante, mais tout à fait absurde.

L’équipe de défense d’Assange a pu se consoler avec les commentaires de Baraitser selon lesquels le 27 juillet était la date limite pour que l’accusation présente des preuves supplémentaires avant l’audience d’extradition de septembre. Une exception était autorisée : les rapports psychiatriques.

L’actuel rédacteur en chef de WikiLeaks, Kristinn Hrafnsson, a eu quelques mots bien sentis pour les procureurs de Wikileaks. «Tous les événements présumés sont connus du ministère public depuis des années. Il ne contient aucune nouvelle accusation. Ce qui se passe réellement ici, c’est que depuis dix ans, le ministère public se révèle toujours incapable de monter un dossier cohérent». L’abandon des actes d’accusation précédents suggère qu’ils «font preuve d’un manque flagrant de respect de la procédure».

Assange est confronté à l’un des montages judiciaires les plus troublants jamais concoctés par un État qui se dit démocratique. Si ce stratagème fonctionne, l’éditeur se retrouvera face aux poursuites judiciaires d’un pays qui se vante d’avoir un amendement qui protège la liberté de la presse mais dont il est exclu. Ce qui est encore plus troublant, c’est la volonté d’élargir la culpabilité aux organes de presse et tous ceux qui diffusent des informations classifiées.

Puis nous passerons au numéro de cirque suivant : une dernière audience au tribunal de Westminster le 14 août, puis l’audience d’extradition le 7 septembre, qui se tiendra au tribunal pénal central que la plupart d’entre nous connaissent sous le nom de Old Bailey. La justice sera-t-elle aveugle, ou simplement aveuglée ?

Dr Binoy Kampmark

bkampmark@gmail.com

Traduction «et encore, on ne vous traduit pas tout, parce que si vous saviez le reste…» par VD pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles

Une misère parmi d’autres : après des mois d’attente (comme pour sa radio), Julian Assange a ENFIN eu droit à un ordinateur (pour préparer sa défense). Les touches du clavier ont été bloquées avec de la colle. Seule la souris fonctionne…

LGS : Assange et sa compagne Stella Morris ont deux enfants.

»» https://www.counterpunch.org/2020/07/31/julian-assanges-political-indi…

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Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir

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« Journal Militant d'Information Alternative » « Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »C'est quoi, Le Grand Soir ? Bonne question. Un journal qui ne croit plus aux "médias de masse"... Un journal radicalement opposé au "Clash des civilisations", c'est certain. Anti-impérialiste, c'est sûr. Anticapitaliste, ça va de soi. Un journal qui ne court pas après l'actualité immédiate (ça fatigue de courir et pour quel résultat à la fin ?) Un journal qui croit au sens des mots "solidarité" et "internationalisme". Un journal qui accorde la priorité et le bénéfice du doute à ceux qui sont en "situation de résistance". Un journal qui se méfie du gauchisme (cet art de tirer contre son camp). Donc un journal qui se méfie des critiques faciles à distance. Un journal radical, mais pas extrémiste. Un journal qui essaie de donner à lire et à réfléchir (à vous de juger). Un journal animé par des militants qui ne se prennent pas trop au sérieux mais qui prennent leur combat très au sérieux.

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