John Africa, autrefois…

MOVE était un groupe de libération des noirs américains, qui prêchait la révolution et prônait le retour à la nature. Cliquez sur l’image pour accéder à des infos complémentaires.

ALLAN ERWAN BERGER  — Le 13 mai 1985, la police de Philadelphie, en Pennsylvanie, bombarda le quartier général de MOVE, communauté fondée par John Africa dans les années 1970 aux États-Unis. Le largage d’une bombe incendiaire sur leur maison tua onze personnes, dont des enfants, toutes brûlées vives. Seuls deux rescapés réchapperont à ce massacre. La police a volontairement laissé brûler tout le bloc, à savoir une soixantaine de maisons.

Largage de la bombe incendiaire par un hélicoptère de la police.

Mumia Abu-Jamal, journaliste, suivait avec attention la répression que les forces de police faisaient subir à ce groupe depuis les années 1970. Mumia Abu-Jamal était même le seul journaliste à faire entendre leur voix.

À Rennes, le 13 mai 2001, une manifestation a réuni près de 250 personnes. Cette année, le 13 mai 2015 sanctionne le trentième anniversaire de ce massacre. Des initiatives se sont déroulées à Philadelphie comme dans d’autres villes du monde, dont Rennes.

Rappeler ce massacre de 1985, c’est rappeler aujourd’hui les conditions de vie désastreuses pour les trois milles condamnés à mort américains, issus des minorités et pauvres pour la plupart, et les deux millions de prisonniers répartis dans les prisons américaines. C’est rappeler qu’il y a encore sept militants de MOVE vivants, emprisonnés depuis 1978, et c’est dénoncer l’acharnement à vouloir « lyncher » Mumia en refusant qu’il soit pris en charge médicalement, en prison, en ce moment même.


À l’initiative du Comité Vie sauve pour Mumia, rendez-vous fut pris ce mercredi 13 mai à 18h devant le Consulat des États-Unis (30 Quai Duguay Trouin, 35000 Rennes). Étaient présentes une trentaine de personnes, dont des représentants du Comité, de la CGT, MVP, PCF, PG, LO, FA.


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Auteur : Comité rennais du Parti de gauche (CC BY-SA 3.0)

Discours tenu devant le consulat des USA :

Les faits de violences policières et racistes subies part les afro-américains aux États-Unis ne datent pas d’hier. Ce qui change c’est qu’une partie de la jeunesse utilise les nouveaux moyens de communications et d’information pour montrer la réalité, la vérité des violences, dans toute leur cruauté.

Aujourd’hui même le Times Magazine reprend le hashtag du storytelling des manifestations #BlackLivesMatter. Les images des lynchages et assassinats font ainsi le tour du monde.

Alors qu’il n’y a pas plus d’agressions qu’au siècle dernier, le fait de les rendre publiques permet à une partie de la jeunesse et de la population de se mobiliser en un temps record.

L’inertie lamentable de Barack Obama a été sanctionnée par une forte abstention de la population afro-américaine, notamment les plus pauvres, aux élections de mi-mandat en 2014. Rien à attendre évidemment des Républicains qui ont même fait reculer la Loi sur les discriminations en vidant de sa substance le Voting Rights Act de 1965.

La société américaine se retrouve dans une situation où le combat pour le respect des droits démocratiques, la justice, contre le racisme, redevient une priorité pour ces jeunes. En cela nous ne pouvons que saluer les mobilisations actuelles aux États-Unis. Comment ne pas se réjouir de voir aux avant-postes la militante Angela Davis ? Qu’ils sachent qu’en France ils peuvent compter sur de vrais amis et camarades.

Ce pays s’est construit en anéantissant les amérindiens par millions, puis en tolérant les activités racistes et violentes du Ku Klux Klan pendant des décennies, bien après la fin de la guerre de sécession.

Rappelons-nous que des milliers d’afro-américain ont été lynchés à mort aux USA, entre les deux guerres. Un récent rapport fait état de 4000 lynchages dans douze États du Sud entre 1877 et 1950. Évoquons parmi d’autres le cas de William Little, survivant des horreurs de la Première guerre mondiale, qui en 1919, revenant chez lui, à Blakely, en Géorgie, fut reçu par une foule blanche. Lorsqu’il refusa de retirer son uniforme de l’armée, il fut lynché.

William Little n’est que l’un des 3.959 Afro-Américains qui furent brutalement et souvent publiquement tués dans les États du Sud entre les deux guerres. Ce rapport révèle une histoire des violences raciales bien plus importante et brutale qu’initialement rapporté, avec au moins 700 lynchages de plus qu’enregistré précédemment.

Nombreuses furent les victimes qui, comme William Little, furent tuées pour des infractions mineures ou pour avoir exigé le respect de leurs droits, ou pour avoir refusé de se soumettre à un traitement injuste. Leur décès, fait valoir le rapport, a laissé une marque indélébile sur les relations raciales en Amérique.

« Le traumatisme et l’angoisse que ces lynchages et violences raciales ont créé dans ce pays continuent de nous hanter et contaminent les relations raciales et notre système judiciaire criminel » affirment les auteurs.

Ces mêmes auteurs regrettent qu’aujourd’hui encore, on note une « étonnante absence d’effort pour reconnaître, discuter ou répondre » à ces violences. Ils font remarquer que le pays ne peut pas espérer guérir de ce chapitre douloureux de son histoire s’il ne reconnaît pas pleinement les massacres de cette époque et les effets dévastateurs qu’ils ont créés.

Retenons au passage ce qu’il nous revient de faire, ici en France, à propos de l’esclavage. Le militant guadeloupéen Élie Domota a raison quand il demande que l’État français abroge les indemnisations accordées aux propriétaires d’esclaves lors de l’abolition, car cela leur a permis d’asseoir leur domination économique et sociale, de créer des banques et de faire en sorte que l’économie coloniale soit préservée.

Le 13 mai 1985 :

Le 13 mai 1985, la police de Philadelphie a décidé d’en finir avec la communauté militante MOVE. Rappelant leur exigence de libération pour neuf de leurs membres emprisonnés en 1978, dont sept survivent encore en prison aujourd’hui, ils manifestèrent, mais la police utilisa des moyens totalement démesurés pour les réprimer. Un hélicoptère largua une bombe incendiaire sur leur maison, tuant onze personnes dont cinq enfants, tous brûlés vifs. Ils ont même laissé le quartier entier brûler.

Aucun responsable politique et policier de ce massacre ne fut condamné. Pourtant un rapport a identifié le recours démesuré de la force ; « déraisonnable » ont-ils dit. En 1996 la justice finit par octroyer une somme de 1,5 millions de dollars à Ramona Africa. Mais les sept emprisonnés de MOVE encore en vie, qui étaient libérables en 2008, sont toujours enfermés.

Cette continuité dans la violence raciste valut à Mumia Abu-Jamal, journaliste qui porta la défense des neuf de MOVE, d’être particulièrement repéré.

Le massacre du 13 mai 1985 s’inscrit dans cette continuité historique d’hystérie raciste contre les afro-américains.

Aujourd’hui, avec tous ceux qui manifestent à Philadelphie, Berlin, Madrid, etc. nous exigeons que justice soit faite, que les responsables de ce massacre soient jugés et condamnés, que les sept MOVE encore prisonniers soient libérés.

Mumia Abu-Jamal va très mal. Son état de santé s’est détérioré en quelques semaines. Les autorités pénitentiaires refusent encore aujourd’hui qu’il puisse être soigné par des spécialistes. Indéniablement elles veulent sa mort.

Grâce à la mobilisation internationale, le droit de visite s’est amélioré mais cela n’a pas encore modifié le comportement assassin des autorités.

Deux informations récentes : pour la première fois le New York Times a accepté de publier un encart publicitaire des soutiens de Mumia – contre paiement évidemment, nous sommes aux États-Unis ! – et la Ligue nationale des avocats américains (National Lawyers Guild), avec le soutien de Kathleen Cleaver, dirigeante historique des Black Panthers et militante des droits de l’Homme, a saisi le rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, Mr Juan Mendez, pour lui demander d’intervenir d’urgence à propos de la situation de Mumia.

Nous nous sommes souvent retrouvés ici pour défendre le militant Mumia injustement condamné. Notamment le 09 décembre 2014 pour les 33 années d’emprisonnement dont 30 passées dans le couloir de la mort.

Cette année, la situation est grave. Notre mobilisation peut être déterminante. Mumia sait que nous nous mobilisons et il s’est exprimé pour nous remercier. Voici son message :

Chers amis, chers frères et sœurs, chers camarades ;

Merci, merci du fond du cœur pour tout l’amour que j’ai reçu de vous et que je continue de recevoir. Dans le monde entier, des centaines, voire des milliers de gens ont téléphoné, écrit, protesté, organisé des manifestations. Je ne savais pas que vous étiez tous là parce que je suis resté inconscient quelque temps ; pendant un moment je n’ai rien vu, rien entendu mais vous avez touché mon cœur, mon corps, et maintenant je me sens porté par vous tous et je vous en remercie. Je ne suis pas redevenu l’homme que j’étais auparavant mais grâce à tout ce soutien, cet amour que je reçois de vous tous, je vais le redevenir.

Je vous aime tous ; vraiment, ce ne sont pas de simples mots, je vous aime de tout mon cœur … Vive John Africa ! Nous gagnerons !

Depuis le pays des prisons, c’est votre frère, Mumia Abu-Jamal.

Envoyez des lettres, des cartes à Mumia ; envoyez les cartes au gouverneur de Pennsylvanie, bref faites tout ce que vous jugerez utile pour renforcer cet élan de solidarité internationale.

Justice et Liberté pour Mumia demeure notre exigence commune. Continuons à la porter tous ensemble.

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Auteur : Comité rennais du Parti de gauche (CC BY-SA 3.0)

FIN

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