Quelques nouvelles passées inaperçues

Quelques nouvelles passées inaperçues

Les derniers jours auront vu certains thèmes phares faire la Une : tension sino-américaine croissante (sur laquelle nous reviendrons très bientôt), pétroliers iraniens vers le Venezuela bafouant ouvertement Washington, Hong Kong à nouveau en ébullition. D’autres nouvelles sont, par contre, restées dans l’ombre, tant dans les médias officiels qu’alternatifs. Elles ne sont pourtant pas dénuées d’importance, loin de là…

Beaucoup a été dit sur la petite friction entre Moscou et Assad ayant vu le jour il y a peu. En cause, un article du prestigieux Conseil russe aux Affaires internationales, affilié au MAE, qui a émis une inhabituelle critique sur la politique de Damas. Il n’en fallait pas plus pour que tout ce que le système impérial compte de petits génies nous resserve l’énième divorce syro-russe, plat indigeste déjà passé par toutes les tables depuis 2015.

Même un observateur respecté comme Bhadrakumar s’est cru obligé d’écrire un papier sur l’affaire, ce qui tend à prouver que, pour une fois, celle-ci n’était effectivement pas inventée de toute pièce. Mais ce que l’on dit moins, et même pas du tout, c’est que quelques jours après ces passagères chicanes, du matériel lourd a débarqué à Tartous à destination d’Assad : hélicoptères Mi-17, blindés etc. A ce prix, on en connaît beaucoup qui aimeraient se chamailler avec Moscou…

Soit dit en passant, l’ambassadeur russe à Damas, en poste depuis 2018, vient d’être nommé représentant spécial du président pour la Syrie, preuve supplémentaire que l’ours n’a aucune intention de lâcher son allié, bien au contraire.

A 12 000 kilomètres de là, il s’est passé des choses bien curieuses en Bolivie. Il y a deux mois, nous écrivions :

La situation était dans la balance jusqu’à ce que les élections prévues pour le 3 mai soient reportées sine die pour cause de coronavirus. En attendant, quel est l’état des forces en présence ? Il y a deux semaines, un sondage établissait la hiérarchie suivante :

  1. MAS : 32,6 %

  2. Carlos Mesa : 19,2 %

  3. Jeanine Áñez (présidente de facto) : 18,2 %

  4. Luis Fernando Camacho et Marco Antonio Pumari : 12,5 %

  5. Chi Hyung Chung évangéliste d’origine sud-coréenne) : 8,6 %

Le parti d’Evo Morales est donc largement en tête mais ne regroupe qu’un tiers de la population (…) La scène politique bolivienne est extrêmement divisée. Si le MAS est en tête, il ne peut prétendre gouverner avec un tiers des votants. Quant à l’autre «camp», si tant est qu’il n’y en ait qu’un seul, il est éclaté et se crêpe régulièrement le chignon.

Le putschinho de novembre a remplacé la bande à Evo par une coterie de conservateurs, souvent religieux et parfois clairement illuminés, persuadés pour certains d’avoir chassé le diable du pouvoir. Quelle n’a pas dû être leur surprise en entendant les critiques acerbes du président de la Conférence épiscopale de Bolivie, Monseigneur Ricardo Centellas. Une attaque en règle, allant du maïs transgénique au manque de respirateurs pour les malades du Covid, et se terminant par ces mots assassins : «Un gouvernement de transition trop soucieux de placer ses affidés dans les institutions publiques n’est pas un gouvernement de transition«.

Paniqué, ledit gouvernement a tenté de rattraper la chose en tendant, un peu grossièrement, la main à l’Eglise. Si, depuis, la tension a baissé d’un cran, la division de l’autre «camp» est bien réelle, même entre gens censés partager les mêmes valeurs, et pourrait favoriser le MAS.

Terminons par une autre nouvelle passée inaperçue. La crise coronavirienne semblait avoir mis les pharaoniques routes de la Soie chinoises en pause. De fait, un certain nombre de projets ont, logiquement, marqué un temps d’arrêt. Pas tous, cependant. Un accord a été trouvé pour la construction de la ligne TGV entre la Chine et la Thaïlande, qui devrait être formellement signé en octobre. Il s’agit évidemment de bien plus que de simples rails : cette voie ferrée matérialise la poussée du dragon vers l’Asie du Sud-est.

Est-ce tout à fait un hasard si l’inénarrable Pompeo vient de menacer l’Australie à propos de l’imminent accord entre l’Etat de Victoria et Pékin sur les routes soyeuses ? Si sa petite phrase – «Nous allons tout simplement déconnecter» – concernait avant tout les télécommunications et l’alliance Five Eyes, le ton du discours et son ambiguïté ont été très diversement appréciés, provoquant une tempête dont les partisans australiens de l’empire se seraient bien passés…

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À propos de l'auteur Chroniques du Grand Jeu

« La géopolitique autrement, pour mieux la comprendre... »Présent à l'esprit de tout dirigeant anglo-saxon ou russe, le concept de Grand jeu est étonnamment méconnu en France. C'est pourtant lui qui explique une bonne part des événements géopolitiques de la planète. Crise ukrainienne, 11 septembre, tracé des pipelines, guerre de Tchétchénie, développement des BRICS, invasion de l'Irak, partenariat oriental de l'UE, guerre d'Afghanistan, extension de l'OTAN, conflit syrien, crises du gaz, guerre de Géorgie... tous ces événements se rattachent directement ou indirectement au Grand jeu. Il ne faut certes pas compter sur les médias grand public pour décrypter l'état du monde ; les journaux honnêtes font preuve d'une méconnaissance crasse, les malhonnêtes désinforment sciemment. Ces humbles chroniques ont pour but d'y remédier. Le ton y est souvent désinvolte, parfois mordant. Mais derrière la façade visant à familiariser avec la chose géopolitique, l'information est solide, étayée, référencée. Le lecteur qui visite ce site pour la première fois est fortement invité à d'abord lire Qu'est-ce que le Grand jeu ? qui lui donnera la base théorique lui permettant de comprendre les enjeux de l’actuelle partie d’échecs mondiale.Par Observatus geopoliticusTags associés : amerique latine, asie centrale, caucase, chine, economie, etats-unis, europe, extreme-orient, gaz, histoire, moyen-orient, petrole, russie, sous-continent indien, ukraine

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