Est-il possible d’effacer les mauvais souvenirs?

Est-il possible d’effacer les mauvais souvenirs?

 

CAROLLE ANNE DESSUREAULT :

Les mauvais souvenirs, blessures et engrammes, ces traces biologiques de la mémoire qui nous jouent des mauvais tours à notre insu, est-il possible de nous en délivrer? On compare souvent le cerveau humain à un ordinateur. S’il suffisait de peser sur un bouton pour faire du nettoyage dans notre disque dur, comme tout serait facile.

Pourtant, ceci est possible. Selon un article paru dans la revue  Science et Vie, (100 questions, 100 réponses), juin 2012, il faut d’abord décider consciemment de vouloir faire des ajustements, effacer des mémoires, etc.

Comment la mémoire fait-elle le tri dans nos souvenirs? La mémoire sémantique et la mémoire épisodique
Notre «grenier à souvenirs» est bien rangé. De nombreuses expériences menées dans les laboratoires de psychologie ont confirmé que notre mémoire est organisée telle que l’a décrit un modèle conçu par le psychologue canadien Endel Tulving. Ce dernier distingue la mémoire sémantique et la mémoire épisodique. La première recouvre nos connaissances sur le monde et sur nous-mêmes. («Berlin est la capitale de l’Allemagne»; «J’ai un enfant»). La seconde est celle des événements de notre vie, inscrits dans un contexte spatial et temporel précis («Lundi, en allant acheter le pain, j’ai croisé une amie»).

Notre mémoire autobiographique est un mélange des mémoires sémantique et épisodique. Le modèle de Tulving comprend aussi le système des représentations perceptives et la mémoire procédurale.

Le premier système est une mémoire inconsciente qui explique qu’on identifie plus rapidement un élément déjà rencontré. Le second regroupe l’ensemble des habiletés motrices (comme faire du vélo). Enfin, la mémoire à court terme constitue un système à part. Elle sert à retenir des informations sur une courte durée (pour retrouver sa voiture sur un parking, par exemple). Quant à savoir si les différents types de mémoire sont bien séparés dans le cerveau … Une étude menée en 2012 sur des rats circulant dans deux labyrinthes par le biologiste tchèque Karel Jezek suggère que c’est le cas. Grâce à des jeux de lumière, le chercheur a fait croire aux rongeurs qu’ils étaient instantanément transportés d’un labyrinthe à un autre. Pendant un court laps de temps, le cerveau des rats, confus, activait alternativement les deux circuits neuronaux correspondant à la mémorisation de chaque labyrinthe. Or, il n’y avait jamais d’état de transition entre ces deux circuits, mais au contraire une sorte de compétition, le cerveau les commutant.

Est-il possible d’effacer les mauvais souvenirs?
Freud lui-même disait qu’il était possible de faire disparaître de notre conscience des souvenirs indésirables en les réprimant, c’est-à-dire en choisissant de ne plus y penser. Mais attention les mauvais souvenirs prendraient alors le chemin de ce qu’on appelle l’inconscient. Est-ce vraiment ce que nous désirons?

En réalité, les neuroscientifiques de nos jours confirment qu’il est possible d’oublier un souvenir sans le faire disparaître de notre cerveau. C’est comme si on barrait l’accès à la mémoire de travail en exerçant un contrôle sur le souvenir que nous ne voulons plus penser. Ce processus nettoie la conscience sans effacer le souvenir.

Il y a quelques années, grâce à l’imagerie cérébrale (IRMf), le processus de mémorisation a été mis en lumière par ces appareils. Il y aurait trois étapes dans le processus de mémorisation avec une mobilisation des aires spécifiques pour chacune d’elles : l’encodage, le stockage, la récupération.

L’encodage place en mémoire toutes les informations qui constituent un souvenir (bruit, image, odeur, émotion …). Le stockage, lui, consolide ces informations pour qu’elles soient conservées durablement – tandis que l’étape de récupération permet de reconstituer le souvenir vivace.

Comment arrivons-nous à bloquer le processus de récupération d’un souvenir? L’IRMf l’a aussi révélé : c’est le cortex préfrontal, situé à l’avant du crâne, qui s’avère le plus activé quand un individu parvient à écarter de sa mémoire une scène dérangeante. Considérée comme le centre du contrôle cognitif, cette zone exerce son pouvoir sur les autres structures en charge des émotions (l’amygdale), de la mémoire (l’hippocampe) et du traitement visuel (le cortex visuel, le thalamus), les invitant au silence.

Au niveau chimique, d’autres travaux suggèrent que cette inhibition du rappel du souvenir serait provoquée par une enzyme, la PPI (protéine phosphatase I) qui empêcherait le développement des zones de contact (les synapses) entre certains neurones. Elle provoquerait la disparition de synapses déjà existantes et par là l’accès à certains souvenirs. Les mécanismes de son action restent très obscurs, mais les chercheurs voient en cette enzyme «la molécule de l’oubli.»

L’attention, une clé précieuse
On entend souvent dire que l’attention de notre pensée est une clé extraordinaire. Car ce sur quoi nous portons notre attention finit toujours par se manifester.

Si nous portons notre attention sur des pensées tristes, négatives, amères, notre champ émotionnel en sera immédiatement rempli répondant aux semences du mental.

Porter notre attention sur des états d’être que nous souhaitons vivre influence grandement nos émotions et notre vision du monde.

En ceci, nous avons le choix d’être créatifs. Une prescription gratuite et à la portée de tous.

Carolle Anne Dessureault

 

 

 

Source : Science & Vie, juin 2012

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